[Descosse, Olivier] La Spirale des Abysses

Un temps mercenaire puis policier, Serge Papadakis gère à présent une société privée de protection rapprochée de personnalités. Il a tiré un trait sur son passé tumultueux, mais une ex petite amie, Muriel, se rappelle à son souvenir après trente ans d'absence. Elle lui annonce que lorsqu'elle l'a quitté, elle était enceinte de lui. Elle lui annonce aussi que cet enfant, Thomas, a disparu depuis neuf mois sans laisser de traces. Après avoir épuisé tous les moyens possibles pour le retrouver, en vain, elle ne voyait plus que Serge pour l'aider.

Serge va donc partir à la recherche de ce fils dont il vient à peine d'apprendre l'existence, et qu'il va pourtant être amené à connaître mieux que sa propre mère. Thomas est un journaliste freelance, spécialisé dans les faits divers, surtout les affaires de meurtre. Cette information va être le point de départ de l'enquête de Serge. L'intrigue va ainsi suivre le schéma d'un fil d'Ariane menant le père au fils. Il sait que pour remonter ce fil, il doit comprendre les motivations de Thomas ; comprendre qui il est. Comme un doigt égrenant les perles d'un chapelet, Serge va avancer étape par étape, avec logique, essayant de deviner les raisonnements et réactions de Thomas à mesure qu'il cerne sa personnalité.

La piste que Serge est amené à suivre est surprenante, voire ahurissante, et pourtant parfaitement cohérente sous la plume d'Olivier Descosse. D'un thème prosaïque, le journalisme d'investigation, car Thomas est un passionné acharné, le roman verse progressivement dans le surnaturel, le spiritisme. Serge est un dur à cuire, solitaire, taciturne, ses années dans la légion l'ont endurci et l'ont même aidé à assouvir ses pulsions violentes. Mais ce qu'il voit se dessiner chez son fils est autrement plus sombre, plus effrayant. Manipulations, mensonges, non-dits, seront autant d'embûches qui viendront entraver son enquête et qu'il devra déjouer pour parvenir à la vérité, à Thomas.

Ce roman est un plaisir à lire : la trame est bien construite, prenante, les évènements s'enchaînent sans aucune longueur et le suspense est maintenu sans relâche. Dans le Vercors les descriptions transcrivent parfaitement l'atmosphère pesante due au silence des habitants, quand en République Démocratique du Congo on ressent l'angoisse de la vie en pleine guerre civile. L'écriture d'Olivier Descosse est agréable, fluide, sans fioritures, et le ton caractéristique des romans noirs. Cerise sur le gâteau, le dénouement est magistralement orchestré, à la hauteur de ce qu'on peut attendre après avoir été tenu en haleine pendant tout le roman.

La spirale des abysses porte bien son titre. C'est une descente aux enfers que Serge et Thomas vivent chacun à leur manière, le premier au sens métaphorique, avec répulsion, le second au sens littéral, avec délectation. Quant au lecteur, c'est sans résistance qu'il se laisse emporter avec eux.