[Vonnegut, Kurt] Nuit mère
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[Vonnegut, Kurt] Nuit mère
Auteur : Kurt Vonnegut
Éditions : Gallmeister
Nombre de pages : 239
ISBN : 978-2-35178-566-9
Date de parution : Août 2016 pour cette édition 1961 pour la première parution.
Quatrième de couverture
“Je suis américain de naissance, nazi de réputation et apatride par inclination.” Ainsi s’ouvrent les confessions de Howard W. Campbell Jr. qui attend d’être jugé pour crimes de guerre dans une cellule de Jérusalem. Ce dramaturge exilé en Allemagne est connu pour avoir été le propagandiste de radio le plus zélé du régime nazi. Mais il clame aujourd’hui son innocence et prétend n’avoir été qu’un agent infiltré au service des Alliés. Il lui reste désormais peu de temps pour se disculper et sauver sa peau.
Traduit de l'américain par Gwilym Tonnerre.
Mon avis
Nous sommes en 1961, Howard W. Campbell nous raconte son histoire.
Né en Amérique, il n'a que onze ans lorsqu'il part vivre en Allemagne. Il apprend très vite la langue de Goethe et c'est en allemand qu'il devient écrivain. Marié à Helga, une jeune actrice, il fréquente l' élite allemande d'avant guerre. Il devient animateur radio et est la voix de la propagande nazi.
Bien sûr ce sont des messages de haine, des discours antisémites, et ses propos donnent la nausée. Il prétend avoir été, avant guerre, contacté par une "Bonne Fée Bleue" le colonel Frank Wirtanen. Agent double?, criminel de guerre? ce sont les questions qu'on pourrait se poser. Howard cherche-t-il à se disculper?
C'est un livre facile à lire. L'auteur nous fait réfléchir non seulement à la façon dont on manipule les gens, à la haine que peuvent susciter certaines personnes, au delà des actes et à ce désir de vengeance souvent malsain que peuvent porter certains (on se demande au nom de quoi d'ailleurs les foules se déchainent!), peut-être pour oublier leurs propres échecs…!
Qu'importe qu'il fut vraiment espion pour les américains ou porte parole des nazis, sa démarche d'écrire sa vérité alors qu'il est en prison, son mal-être, sa vision de lui, la façon dont il perçoit son environnement, l'amour, l'amitié ne font pas de lui un héros antipathique, c'est juste un homme qui parfois n'a pas fait les bons choix.
Je remercie Partage lecture et les éditions Gallmeister pour ce partenariat.
joëlle- Modérateur
-
Nombre de messages : 9665
Localisation : .
Date d'inscription : 30/09/2013
Re: [Vonnegut, Kurt] Nuit mère
Mon avis :
Un homme. Une nuit. Sa vérité.
Howard Campbell va être jugé pour crime contre l'humanité, quinze ans après la fin de la seconde guerre mondiale. Il nous raconte ce qu'il a vécu, comment il a été engagé, comment il a œuvré, pour le compte des Etats-Unis, sans véritablement savoir les informations qu'il transmettait via ses émissions de propagande. Il a vécu aussi, eu des amis, vécu une grande histoire d'amour avec Helga, se montra cruel aussi (là, vous vous doutez bien que j'expose mon propre point de vue).
Mon premier constat est que ce livre est facile à lire, l'écriture, ou plutôt les paroles d'Howard coulent toute seule, les chapitres sont bien conçus et nous donnent envie de poursuivre la lecture - d'en savoir plus, finalement, sur cet homme. Et cette facilité de lecture me fait immédiatement penser à une chose : puisqu'il est si facile à lire, il lui a été facile, à lui, à d'autres, d'endoctriner d'autres hommes. Le pouvoir de la parole. Preuve en est que l'on peut devenir un héros aux yeux des autres, et pas pour les bonnes raisons.
Je ne peux qu'être effarée par ce que nous montre Kurt Vonnegut : le racisme et l'antisémitisme profond, y compris après la guerre, sévissent toujours, et il suffit de peu pour se liguer les uns contre les autres, voir les autres contre une seule personne. Préserver la "pureté de la race" n'est pas l'apanage du troisième Reich. Et l'étrangeté de certaines alliances ferait presque sourire n'était la gravité de l'enjeu.
Les paroles ne se sont pas envolés, les écrits sont restés aussi - les poèmes d'Howard, les lettres qu'il reçoit sont autant d'effet de réel pour confirmer sa carrière d'auteur et présenter une version de la vérité, non replongeant ainsi dans son passé. Howard ne se définit pas (seulement) en fonction de la guerre, il se définit en fonction d'Helga, de son amour inconditionnel pour elle, de la douleur liée à sa disparition. Un seul être vous manque et plus rien n'a d'importance.
Howard n'est pas un homme, non plus que son beau-père. Howard est un symbole, au même titre que ceux qu'il a dessinés, un jour, sur la fenêtre de son appartement, le symbole de ce que les hommes "de bonne volonté" n'ont pas pu empêcher - sans oublier les quelques "ratés" du rêve américain. Howard est le symbole, aussi, de la distinction entre justice et vengeance - justice qu'il réclame, presque seul.
Nuit mère - ou la confession d'un homme infiniment seul.
Merci aux éditions Gallmeister et au forum Partage-Lecture pour ce partenariat.
Un homme. Une nuit. Sa vérité.
Howard Campbell va être jugé pour crime contre l'humanité, quinze ans après la fin de la seconde guerre mondiale. Il nous raconte ce qu'il a vécu, comment il a été engagé, comment il a œuvré, pour le compte des Etats-Unis, sans véritablement savoir les informations qu'il transmettait via ses émissions de propagande. Il a vécu aussi, eu des amis, vécu une grande histoire d'amour avec Helga, se montra cruel aussi (là, vous vous doutez bien que j'expose mon propre point de vue).
Mon premier constat est que ce livre est facile à lire, l'écriture, ou plutôt les paroles d'Howard coulent toute seule, les chapitres sont bien conçus et nous donnent envie de poursuivre la lecture - d'en savoir plus, finalement, sur cet homme. Et cette facilité de lecture me fait immédiatement penser à une chose : puisqu'il est si facile à lire, il lui a été facile, à lui, à d'autres, d'endoctriner d'autres hommes. Le pouvoir de la parole. Preuve en est que l'on peut devenir un héros aux yeux des autres, et pas pour les bonnes raisons.
Je ne peux qu'être effarée par ce que nous montre Kurt Vonnegut : le racisme et l'antisémitisme profond, y compris après la guerre, sévissent toujours, et il suffit de peu pour se liguer les uns contre les autres, voir les autres contre une seule personne. Préserver la "pureté de la race" n'est pas l'apanage du troisième Reich. Et l'étrangeté de certaines alliances ferait presque sourire n'était la gravité de l'enjeu.
Les paroles ne se sont pas envolés, les écrits sont restés aussi - les poèmes d'Howard, les lettres qu'il reçoit sont autant d'effet de réel pour confirmer sa carrière d'auteur et présenter une version de la vérité, non replongeant ainsi dans son passé. Howard ne se définit pas (seulement) en fonction de la guerre, il se définit en fonction d'Helga, de son amour inconditionnel pour elle, de la douleur liée à sa disparition. Un seul être vous manque et plus rien n'a d'importance.
Howard n'est pas un homme, non plus que son beau-père. Howard est un symbole, au même titre que ceux qu'il a dessinés, un jour, sur la fenêtre de son appartement, le symbole de ce que les hommes "de bonne volonté" n'ont pas pu empêcher - sans oublier les quelques "ratés" du rêve américain. Howard est le symbole, aussi, de la distinction entre justice et vengeance - justice qu'il réclame, presque seul.
Nuit mère - ou la confession d'un homme infiniment seul.
Merci aux éditions Gallmeister et au forum Partage-Lecture pour ce partenariat.
Sharon- Modérateur
-
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Age : 46
Localisation : Normandie
Emploi/loisirs : professeur
Genre littéraire préféré : romans policiers et polars
Date d'inscription : 01/11/2008
Re: [Vonnegut, Kurt] Nuit mère
J'ai fait une belle découverte avec ce roman surprenant.
Pour commencer, j'ai apprécié la mise en route de l'auteur. Celui-ci nous dit n'avoir fait que recueillir le manuscrit de Howard W. Campbell Jr., reprenant seulement certains passages pour en permettre l'édition. Le cadre qu'il pose nous éloigne d'emblée de la fiction. C'est donc bel et bien cet homme qui nous livre ici son histoire. Témoignage, récit autobiographique ou dossier constitué en vue de sa défense? Notre narrateur est emprisonné en Israël dans l'attente de son jugement pour crime de guerre et il met par écrit tous les éléments nous permettant de comprendre comment il en est arrivé là.
Contrairement à ce qui est noté dans la quatrième de couverture, je n'ai pas eu le sentiment qu'il clamait son innocence, mais plutôt qu'il tenait à fournir tous les détails, assumant le rôle clef qu'il a eu dans la propagande nazie même si ce n'était qu'en tant qu'espion infiltré.
Ce roman est très intéressant car derrière une plume dynamique et agréable, avec même quelques tournures poétiques, il ouvre divers champs de réflexion.
Le poids des mots pour commencer. Cet homme n'a jamais tué personne (enfin, pas pendant la guerre) et va être jugé au même titre que les responsables de milliers de morts. Il ne diminue à aucun moment la portée de ses actes, bien au contraire, et on prend la pleine mesure des répercussions de ses passages radiophoniques bien au delà des frontières.
La notion de choix ensuite. Lorsqu'il raconte sa première rencontre avec l'agent qui l'a recruté, on a l'impression qu'il doit faire un choix. Ce n'est pourtant pas réellement le cas. Certes il nous parait loin de l'homme qui sert son pays au prix de tous les sacrifices, cette couverture lui permettant de vivre sa vie culturelle et son amour passionnément. Il va pourtant être l'espion le plus utile de cette guerre.
J'ai beaucoup apprécié ce personnage et le regard qu'il porte sur la vie et les gens qui l'entourent, porté par l'amour d'une vie, acceptant qu'il n'y ait rien à gagner pour lui au terme de ce marché, et aspirant finalement à ce jugement des hommes.
Merci à Joëlle de m'avoir proposé cette lecture ainsi qu'au forum Partage Lecture et aux éditions Gallmeister.
Pour commencer, j'ai apprécié la mise en route de l'auteur. Celui-ci nous dit n'avoir fait que recueillir le manuscrit de Howard W. Campbell Jr., reprenant seulement certains passages pour en permettre l'édition. Le cadre qu'il pose nous éloigne d'emblée de la fiction. C'est donc bel et bien cet homme qui nous livre ici son histoire. Témoignage, récit autobiographique ou dossier constitué en vue de sa défense? Notre narrateur est emprisonné en Israël dans l'attente de son jugement pour crime de guerre et il met par écrit tous les éléments nous permettant de comprendre comment il en est arrivé là.
Contrairement à ce qui est noté dans la quatrième de couverture, je n'ai pas eu le sentiment qu'il clamait son innocence, mais plutôt qu'il tenait à fournir tous les détails, assumant le rôle clef qu'il a eu dans la propagande nazie même si ce n'était qu'en tant qu'espion infiltré.
Ce roman est très intéressant car derrière une plume dynamique et agréable, avec même quelques tournures poétiques, il ouvre divers champs de réflexion.
Le poids des mots pour commencer. Cet homme n'a jamais tué personne (enfin, pas pendant la guerre) et va être jugé au même titre que les responsables de milliers de morts. Il ne diminue à aucun moment la portée de ses actes, bien au contraire, et on prend la pleine mesure des répercussions de ses passages radiophoniques bien au delà des frontières.
La notion de choix ensuite. Lorsqu'il raconte sa première rencontre avec l'agent qui l'a recruté, on a l'impression qu'il doit faire un choix. Ce n'est pourtant pas réellement le cas. Certes il nous parait loin de l'homme qui sert son pays au prix de tous les sacrifices, cette couverture lui permettant de vivre sa vie culturelle et son amour passionnément. Il va pourtant être l'espion le plus utile de cette guerre.
J'ai beaucoup apprécié ce personnage et le regard qu'il porte sur la vie et les gens qui l'entourent, porté par l'amour d'une vie, acceptant qu'il n'y ait rien à gagner pour lui au terme de ce marché, et aspirant finalement à ce jugement des hommes.
Merci à Joëlle de m'avoir proposé cette lecture ainsi qu'au forum Partage Lecture et aux éditions Gallmeister.
Piplo- Membre assidu
-
Nombre de messages : 144
Age : 45
Localisation : Essonne
Date d'inscription : 23/02/2012
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