[Paty, Mickaëlle] Le cours de monsieur Paty
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[Paty, Mickaëlle] Le cours de monsieur Paty
Résumé de couverture :
J`ai décidé de publier le cours de mon frère pour lui rendre sa dignité d`homme et de professeur. Parce que ce cours est la raison pour laquelle mon frère est mort, et que vous ignorez tout de son contenu. Vous ne savez pas que c`est dans le cadre de cet enseignement, inscrit au programme de quatrième, que Samuel a montré des caricatures.
Je le publie aussi parce que j`ai entendu trop de « Oui, mais. » Or en France, on ne met pas de « Oui, mais » après qu`un professeur se soit fait décapiter. On met un point. »
Après la mort de son frère, il a fallu quatre ans d'enquêtes à Mickaelle Paty pour faire la lumière sur cette affaire qui a bouleversé la France. Son combat pour rétablir la vérité révèle les failles de l'administration, les manquements politiques. Et, par-dessus tout, l'abandon d`un homme à la barbarie et, avec lui d'une partie de nos valeurs.
Mon avis :
À l'heure où le procès des personnes majeures impliquées dans le meurtre du professeur d'histoire-géographie Samuel Paty, décapité pour avoir montré trois caricatures de Charlie Hebdo dans le cadre d'un cours sur la liberté d'expression, est annoncé pour la fin de cette année 2024, sa sœur Mickaëlle écrit ce livre pour que l'on connaisse les éléments de ce cours qui a tant fait parler. Contrairement à une idée répandu à l'époque, Samuel n'avait pas exagéré, il n'avait pas provoqué les élèves de confession musulmane ; il avait encore moins commis de discrimination envers ces élèves en les forçant à se désigner devant la classe et en les mettant dehors, pendant qu'il montrait les caricatures aux autres. Il était complètement dans les clous, conscient de ce qu'il faisait, et usait d'un matériel pédagogique et d'une trame de cours officiels. De plus, ce cours était délivré depuis 2015, et cela n'avait jamais entraîné de problème.
Il aura fallu qu'une élève mente sur sa présence en classe, que le père de celle-ci soit en manque de combat pour la charia, qu'un militant islamiste se faisant passer pour un imam s'en mêle, qu'un jeune radicalisé ait trouvé le prétexte pour mourir en martyr... et que l'institution se renie à coups de lâchetés successives, laissant Samuel totalement seul face aux menaces pesant sur sa vie, pour que l'impensable soit commis. Ici vous savez tous comment cela a fini, mais nous devons apprendre le déroulement précis des faits.
J'ai fait partie, je le dis, des personnes obsédées par ce drame, par ce qu'il révélait des carences de l'Éducation Nationale en termes de protection des enseignants : nous savons également que Dominique Bernard n'a même pas été incriminé de quoi que ce soit, d'aucune "maladresse pédagogique" - le terroriste cherchait un professeur d'histoire-géographie ou de français. Mickaëlle Paty nous révèle l'engrenage fatal depuis le cours aux élèves de quatrième (deux classes), la crise de colère de Brahim Chnina, qui ne pouvait concevoir que sa fille soit exclue pour indiscipline, les différentes tentatives d'apaisement - en premier lieu, nous démontre-t-elle, pour éviter le rassemblement de musulmans promis par le faux imam Sefrioui. Le comble étant que Samuel Paty ait été désigné par la Principale du collège comme l'auteur d'une atteinte à la laïcité sur un groupe d'élèves victimes, que la famille de Zora, l'élève qui avait menti, ait d'abord porté plainte contre l'enseignant pour diffusion de contenu pornographique sur mineurs... Relèverons-nous ces deux collègues qui se désolidarisent de Samuel, l'un par jalousie parce que ce dernier était référent culture, l'autre se mettant en scène devant les élèves pour se donner le beau rôle ? Je vous en passe, mais à vrai dire, les éléments totalement incroyables dans cette enquête qui se termine ne manquent pas.
Mickaëlle Paty fait avec ce livre un sans-faute : c'est toujours rigoureux sur les faits, et implacable sur la recherche de vérité. À l'issue de cette lecture, on ne peut qu'espérer que les coupables soient réellement punis à la hauteur de ce crime atroce, et que les responsabilités de l'État dans les manquements sidérants constatés dans cette affaire soient mises à jour, pour qu'on prenne enfin le problème à bras-le-corps et qu'une vraie laïcité retrouve sa place dans l'école. Mickaëlle Paty fait preuve de volonté et d'éducation en intervenant auprès d'élèves : que faisons-nous, chacun d'entre nous, pour faire vivre la laïcité dans l'enceinte de l'école, et couper court à toute compromission avec l'entrisme islamiste ? 5/5
Citations :
Et alors que je n'aspirais qu'à maintenir ma tête hors de l'eau, plus les jours passaient et plus j'avais l'impression de couler. De jouer un rôle, d'être dans le faux. (page 12)
Cette méthode des dilemmes moraux est une préconisation d'Eduscol, qui la considère idéale pour développer l'autonomie morale des adolescents et accroître leurs capacités de raisonnement, c'est-à-dire forger leur esprit critique. (page 36)
Ce qui rend sa mort si singulière, c'est l'autre attaque dont il a fait l'objet. Une attaque morale, insoupçonnée, visant non plus le contenu mais la pédagogie de son cours, et portée par ceux qui étaient sensés être de son camp : ses collègues, sa hiérarchie. (page 90)
Peut-être plus grave encore, on y* apprend que la défense de la laïcité se délite chez les adultes, notamment au sein d'une jeune génération d'enseignants bercés par l'émergence de termes tels que "laïcité ouverte", ou encore "laïcité plurielle", qui la confondent avec la tolérance et s'interrogent sur son utilité.
*Mickaëlle Paty cite un extrait de l'introduction du rapport de la commission d'enquête de mars 2024. (page 137)
Accusée de diviser et de discriminer, la laïcité est devenue, au fil du temps, une valeur perçue comme négative, que de moins en moins de monde, au nom de la bienveillance, assume de promouvoir. Je n'y vois pour ma part que de la lâcheté déguisée. (page 162)
Ce comportement attentiste, qui consiste à agir lorsque le crime a eu lieu afin d'éviter toute stigmatisation et amalgame, illustre l'argumentation visant à éviter les confrontations avec la violence islamiste. Nous sommes arrivés au point tragique où l'on tolère le crime pour répondre au besoin émotionnel du criminel d'en commettre un. (page 196)
Dernière édition par elea2020 le Mer 30 Oct 2024 - 15:32, édité 2 fois
elea2020- Grand sage du forum
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Re: [Paty, Mickaëlle] Le cours de monsieur Paty
Merci elea pour ta critique
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Lecture en cours :
Silo de Hugh Howey
La Princesse des glaces de Camilla Läckberg
Re: [Paty, Mickaëlle] Le cours de monsieur Paty
Tchezare a écrit:Merci elea pour ta critique
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J'ai voté : comme j'écris de manière improvisée, je prends toujours du temps pour me relire et éditer ma critique, puis je vote à la fin.
elea2020- Grand sage du forum
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Re: [Paty, Mickaëlle] Le cours de monsieur Paty
Il faut absolument que j'achète ce livre. J'ai été moi aussi très marquée par cet assassinat -cette exécution publique. La stupeur ressentie, la rage sourde. Certains crimes hantent plus que d'autres.
Ne jamais s'habituer, ne jamais se résigner.
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Alise- Apprenti
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Re: [Paty, Mickaëlle] Le cours de monsieur Paty
C'est effectivement une lecture essentielle. Même aujourd'hui, est-ce que nous en avons saisi tous les retentissements ? Je n'en suis pas sûre.
elea2020- Grand sage du forum
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