[Jonquet, Thierry] Mygale

Idem.
150 pages seulement pour un sujet pareil, c'est quand même triste. D'autant que je me demande ce que peuvent bien devenir les personnages après ça...
et il y aurait matière à plein d'autres rebondissements...Rien qu'à imaginer qu'ils continuent leur cohabitation à la fin (?), il y a quand même la fille qui est toujours vivante, bien que folle...et si elle se réveillait, même des années et des années plus tard...et qu'elle voyait ce qu'ils sont devenus...(On a déjà vu des rebondissements moins vraisemblables). En plus, il y a cette scène, alors que les médecins viennent de dire qu'il fallait abandonner tout espoir, où elle fixe la porte d'un air mauvais alors qu'Alex se tient derrière le judas et n'ose pas entrer...Elle aurait encore mieux reconnu quelqu'un d'autre qu'Alex, s'il était entré.

Seulement, Thierry Jonquet, quand il a écrit Mygale, est parti de la chanson The Man I love, qu'il mentionne plusieurs fois dans son roman, dont il va jusqu'à recopier les paroles (les paroles sont sur le net : quand on les lit, on se remémore des scènes du roman...c'est troublant), et le livre est surtout une courte variation autour des ces paroles.
Comment a-t-il bien pu pondre un roman aussi noir à partir d'une chanson où une jeune fille raconte son attente du prince charmant ? Je me le demande encore...(Le début de la chanson, c'est l'histoire de Viviane alors que la fin, "He'll build a little home /Just meant for two / From which I'll never roam"...Ceux qui ont lu le livre savent qui ne pourra jamais se sauver de la maison faite juste pour deux personnes et le "He" devient alors quelqu'un d'autre, mais vu le jeu sur les identités dans ce roman...).
Rien que pour la blague : le titre The man I love était à l'origine inclus dans The girl I love.
J'en suis restée scotchée (et il y a tellement d'autres détails troublants : le scotch, par exemple, puisque je viens de dire que je suis restée scotchée. Que boit Vincent quand il offre à Viviane un coca ? Un scotch...et c'est la même boisson qu'on retrouve plus tard, à un moment où Richard humilie Eve...pas par hasard. Rien n'est laissé au hasard : Alex fait des puzzles dans sa chambre et le roman est un puzzle, par exemple.).

Donc mon ressenti, c'est que c'est un des meilleurs livres que j'ai lus.
Magistral. Terrible. Une intrigue de fou.
Et en même temps...150 pages seulement ! Je le note quand même "excellent", mais bon, quoi...
Vous connaissez d'autres livres, dans le même genre, qui mène autant ses lecteurs en bateau, se déploie à partir d'une chanson (Agatha Christie le faisait souvent aussi, mais dans un autre style), est bien écrit, troublant, malsain...mais en beaucoup plus que 150 pages ? :<è: :>i:
(Et en plus, dans les 150 pages, il y a les pages avec Alex qui sont moins intéressantes que le reste... mais il n'était pas dans la chanson de Gerschwin, lui...)

(Je n'ai pas vu le film d'Almodovar...d'après ce que j'en ai lu, ici et là, il a surtout exploité l'aspect transexualité / filiation (alors que Jonquet dit rapidement que la mère de Viviane est morte dans un accident d'avion) / docteur Frankenstein. Je comprends qu'on puisse tirer les 150 pages dans cette direction, vu toute la matière qu'il y a dans ces 150 courtes pages. Mais sans l'aspect conte de fées (château, grille, domestiques...cygnes, etc, toutes les premières pages y baignent) qui vire au cauchemar...je sens que ça ne va pas me plaire.)