[Autissier, Isabelle] Seule la mer s'en souviendra

288 pages
Date de parution: 09/02/2011
EAN : 9782253133513
Editeur : Le Livre de Poche
Editeur d'origine : Grasset

Présentation de l'éditeur

En 1969, Peter March, un père de famille, bon marin et amateur de défis, se lance dans l’aventure : participer à sa première course en solitaire, autour du monde et sans escale. Pas seulement pour y inscrire le nom de Sailahead, le trimaran révolutionnaire que cet électronicien fantasque a construit de ses mains. Mais pour la gloire. Pour s’inventer un destin. De déceptions en accidents, seul face à la mer, Peter March fabrique le plus fascinant des mensonges commis sur un voilier : il invente sa position. S’inspirant de son expérience de navigatrice en solitaire autant que d’un célèbre fait divers, Isabelle Autissier raconte l’affrontement fascinant entre un homme et l’océan, entre la raison et la folie.

"Elle écrit avec sensibilité, sans afféterie, forte de ses expériences mais aussi de ses échecs." Robert Solé, Le Monde des livres.

Mon avis

Prendre la mer seul sur un voilier pour un tour du monde en solitaire : c'est aujourd'hui un défi sportif, technique et personnel incroyablement exigeant. Dans les années 1960, cela relevait même de la science fiction. Pourtant, une première course a été organisée à la fin de la décennie. Dès cette première édition, on a pu constater la diversité de ceux et celles qui se lançaient à l'aventure. Il y a des techniciens rigoureux, formés par les études ou par l'armée, aussi bien que des poètes menant en mer une quête mystique. On rencontre des champions historiques dans les deux catégories. Isabelle Autissier, qui fut une (immense) navigatrice avant d'écrire, me semble appartenir à la première. Son héros, Peter March, se situe résolument de l'autre côté de la barrière, même s'il s'évertue à faire croire le contraire à son entourage.

Isabelle Autissier parvient à nous embarquer dans le sillage de son personnage farfelu, à nous intéresser à ses projets que l'on sent bancals dès le montage, à ses états d'âme face à des difficultés dont on a du mal à croire qu'il a pu ne pas les anticiper ... Le fait d'avoir confié une partie de la narration à la fille du navigateur est un bon ressort. Il est difficile de ne pas en vouloir à Peter March d'avoir mis en péril toute sa famille pour une course pour laquelle il était si peu préparé. Sa fille, Eva, se pose ces questions et répond à ses critiques. Elle a envie d'en savoir plus, son impatience et sa curiosité éveillent les nôtres - même si, en ce qui me concerne, je connaissais déjà l'histoire dont s'inspire le livre, j'en connaissais donc la fin. L'alternance des chapitres entre le livre de bord et le journal intime d'Eva permet aussi de quitter le huis clos du navire pour ancrer le récit dans des dynamiques humaines et des problématiques terrestres que nous, lecteurs, connaissons mieux.

Sous ses airs de roman d'aventure, ce livre invite également à questionner le regard que l'on porte collectivement sur les héros, à reconsidérer ce qu'on appelle une vie réussie. Tout le monde n'est pas fait pour être un champion de course au large, mais d'autres vies valent malgré tout la peine d'être vécues. Enfin, Isabelle Autissier nous rappelle à quelle point la mer est puissante et combien nous devons être humbles face à elle. Je recommande cette lecture, surtout à celles et ceux qui sont en manque de voyages et d'air pur en ces temps confinés !

J'aime beaucoup cette femme, ce livre me fait envie, merci Algue !