GUIBERT, Hervé

Photo de Martine Franck / Magnum Photos

Biographie :
Hervé Guibert naît le 14 décembre 1955 à Saint-Cloud, mais il fera ses études secondaires à La Rochelle, où ses parents ont déménagé. Il a 14 ans et joue dans une troupe de théâtre, lorsqu'il rencontre un garçon de 3 ans son aîné : il s'agit de Philippe Mezescaze, qui racontera cette rencontre et cet amour foudroyant dans Deux garçons (Mercure de France).

À 18 ans, il revient à Paris pour tenter deux grandes écoles qui le lanceraient dans le milieu de l'art, de la photographie ou du cinéma (l'IDHEC et le Conservatoire), mais il échoue. Il aura la possibilité malgré tout d'écrire des articles de cinéma dans des revues.

Trois ans plus tard, il rencontre l'homme qu'il aimera toute sa vie, Thierry, et son épouse Christine, et voyage avec eux en Italie. En 1977, il commence à écrire des articles pour Le Monde ; son premier ouvrage, La Mort propagande est publié.

En 1979, il voyage sur l'île d'Elbe, invité par Hans Georg Berger, photographe allemand, ainsi qu'à Sienne et à Palerme.

En 1979-1982, il collabore aux éditions de Minuit avec Mathieu Lindon. Il y rencontre également Eugène Savitskaya. Il publie aussi des livres de photographies et il est exposé en divers endroits. La photographie est indissociable de son travail d'écriture.

En 1983, il écrit avec Patrice Chéreau le scénario de L'Homme blessé, qui recevra le César du meilleur scénario original.

En 1985, première apparition à Apostrophes pour son livre Des Aveugles, qui sera mis en scène l'année suivante.

De 1987 à 1989, il est pensionnaire à la Villa Médicis, peu ou prou en même temps que Mathieu Lindon et Eugène Savistkaya. Mathieu Lindon consacrera en 2021 un livre à sa relation avec Hervé et cette période à la Villa Médicis, Hervelino.

Janvier 1988, il apprend qu'il est atteint du SIDA. En 1990, il apparaît de nouveau dans Apostrophes pour parler de son livre À l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie. Il s'y montre digne et émouvant, c'est un moment remarquable.

En 1991, après une tentative de suicide manquée, il est hospitalisé et meurt quelques jours plus tard, le 27 décembre. Il est enterré selon son souhait sur l'île d'Elbe. Son ami Thierry mourra un an après lui, du SIDA également.

Plusieurs de ses œuvres seront publiées à titre posthume, notamment son Journal en 2001.

Bibliographie :
- La Mort propagande, 1977, éditions Régine Deforges
- Suzanne et Louise, 1980, éditions Libres-Hallier. C'est un roman-photo avec ses deux grands-mères, réalisé en 1977.
- L'image fantôme, 1981, Les Éditions de Minuit
- Les Aventures singulières, 1982, Les Éditions de Minuit
- Les Lubies d'Arthur, 1983, Les Éditions de Minuit
- Catalogue de son exposition Le Seul visage (galerie Agathe Gaillard), 1984, aux Éditions de Minuit
- Des Aveugles, 1985, éditions Gallimard (prix de la fondation Fénéon)
- Mes parents, 1986, éditions Gallimard
- Vous m'avez fait former des fantômes, 1989, éditions Gallimard. Le titre vient d'une lettre de Sade à sa femme en 1783 : "Vous m'avez fait former des fantômes qu'il faudra que je réalise."
- Les Gangsters, 1988, Les Éditions de Minuit. Mauve le vierge, éditions Gallimard.
- Fou de Vincent, 1989, Éditions de Minuit. L'Incognito, éditions Gallimard
- À l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie, 1990, éditions Gallimard. Tournage du film La Pudeur ou l'impudeur.
- Le Protocole compassionnel, 1991, éditions Gallimard. Vice, éditions Jacques Bertoin (livre de photos réalisé en 1979). Mon Valet et moi, Seuil.

Livres édités post-mortem :
- L'Homme au chapeau rouge, 1992, éditions Gallimard. Cytomégalovirus, Éditions du Seuil.
- Le Paradis, 1993, éditions Gallimard - écrit en 1991 lors de son dernier voyage en Asie. Photographie, livre de ses photos aux éditions Gallimard.
- Vole mon dragon, 1994, éditions Gallimard. La piqûre d'amour et autres textes suivi de La Chair fraîche, idem.
- Lettres d'Égypte, 1995, Actes sud, avec des photographies de Hans Georg Berger.
- Enquête autour d'un portrait (sur Balthus), 1997, Les Autodidactes.
- La Photo, inéluctablement, 1999, éditions Gallimard : recueil d’articles sur la photographie publiés au Monde de 1977 à 1985
- Mausolée des amants (Journal de 1976 à 1991), 2001, éditions Gallimard

Des rééditions, mises en scènes, expositions, n'ont cessé d'avoir lieu de 2001 à aujourd'hui, 22 ans déjà...

On notera encore une biographie d'Arnaud Genon qui lui est consacrée : L'Aventure singulière d'Hervé Guibert (Mon Petit Éditeur), ou Lettres à Eugène, 2013, correspondance Hervé Guibert - Eugène Savitskaya 1977-1987.

Hervé Guibert est un auteur majeur qu'on ne peut oublier, il est sans doute le fondateur du genre autofiction. Il semblait se mettre beaucoup en scène, mais c'était un jeune homme solitaire et mélancolique, particulièrement sensible. Ses livres ne sont pas si facilement accessibles, et comprennent des passages érotiques, toutefois il fait vraiment date dans la littérature contemporaine. Je suis passée à côté dans les années 80-90, parce qu'on faisait trop de battage autour de ses livres, il ne m'a donc pas attirée comme auteur ; je le regrette et je vais m'attacher à le découvrir.

On remarque dans sa bibliographie qu'il a multiplié les livres à partir de l'annonce du SIDA, en 1988 : il semble avoir essayé de mettre les bouchées doubles, lui qui s'alimentait difficilement et avait tellement maigri. Il raconte à "Apostrophes" qu'au début du SIDA, lorsqu'on leur en a parlé, Michel Foucault s'est laissé rouler en bas du canapé, tant il riait : "Qu'est-ce que c'est que cette affabulation ? Écoute, un cancer d'homosexuels, ce serait trop beau pour être vrai !" Il en mourra pourtant en juin 1984.

Autres sources pour découvrir Hervé Guibert :
- Un film en replay sur le site Arte, Hervé Guibert, la mort propagande, de David Teboul, avec de nombreuses photos, extraits de ses films, livres, très complet et émouvant. Il est difficile de ne pas être happé.e par sa beauté, son regard. 65 mn, 2021. Il a été ma porte d'entrée dans son œuvre : https://www.arte.tv/fr/videos/094493-000-A/herve-guibert-la-mort-propagande/
- Site internet dédié à Hervé Guibert, ma source pour la biographie et bibliographie : https://www.herveguibert.net/
- Hervé Guibert à Apostrophes, archives de l'INA : https://www.youtube.com/watch?v=QzSt0q78vSg&t=7s
- Deux vidéos "fou de Guibert" #1 et #2, de Maël Bouteloup, blogueur lecture de qualité : https://www.youtube.com/watch?v=bQNrBVRLHBU

Étonnant de voir ce thème alors que je suis en pleine relecture de tous ses livres que j'ai accumulé depuis une dizaine d'années....

LOUBHI 49 a écrit:Étonnant de voir ce thème alors que je suis en pleine relecture de tous ses livres que j'ai accumulé depuis une dizaine d'années....

Je suis contente de voir un autre lecteur. Je vais m'acheter de ses livres dès demain, ce que j'ai vu de son écriture m'a complètement fascinée.

J'ai édité pour ajouter le lien du film sur Arte : je l'ai vu par hasard et ne pensais pas du tout à le lire, mais je suis tombée sur ce passage qui m'a donné envie d'en savoir plus :
"J'entreprends un nouveau livre afin d'avoir un compagnon, un interlocuteur, quelqu'un avec qui manger et dormir, auprès de qui rêver et cauchemarder, le seul ami présentement tenable, bien que je sois le maître absolu dans cette navigation à vue.

C'est comme si je cherchais un signe et que je l'avais trouvé dans cet extrait...